Le processus de transition: Comment vivre le changement
Quand on vit un événement, qu’il soit choisi ou non, un changement s’opère et commence alors la grande traversée des étapes de la transition!
Il existe différents types de transition:
- Transition de vie : de l’enfance à l’adolescence, vers l’âge adulte, de la vie active vers la retraite, transition liée à la perte ( emploi, être cher), transition de mi-vie.
- Transitions scolaires et académiques ou vers le marché du travail.
- Transitions professionnelles: Changement de poste, d’entreprise, perte d’emploi, accident du travail, départ à la retraite.
Mais de quoi parle t’on? Quelles sont les étapes d’une transition ?
L'art de traverser les transitions selon Bridges et Roberge
Les transitions de vie, qu’elles soient professionnelles, personnelles ou émotionnelles, font partie intégrante de notre parcours de vie. Mais comment comprendre et accompagner ces changements ? Si certaines transitions peuvent être vécues comme des ruptures violentes, d’autres sont perçues comme des moments de flottement où tout semble incertain. Les modèles théoriques développés par William Bridges et Madeleine Roberge offrent des clés pour comprendre et apprivoiser ces périodes de transformation. Ils nous éclairent sur ce grand vide qui nous effraie tant (ou appelée aussi zone neutre) et pourtant, que nous devons traverser comme étape indissociable du reste du processus de changement.
Le Modèle de Bridges : Une Transition en Trois Phases
William Bridges, dans son ouvrage Transitions (1980), propose une approche du changement fondée sur l’idée que la vie est une succession continue de transitions plutôt que de simples crises ponctuelles. Pour lui, la transition est un processus qui se déroule en trois grandes étapes : la fin, la zone neutre et le nouveau départ.
1. La Fin : L’acte de Lâcher Prise
La première étape du processus de transition, selon Bridges, commence par une fin, c’est-à-dire un détachement de l’ancien soi ou d’une situation passée. Cela peut concerner un changement de carrière, une rupture amoureuse, un déménagement, ou tout autre événement majeur qui redéfinit notre identité ou nos repères. Cette phase implique plusieurs sous-étapes : le désengagement, la désidentification, le désenchantement et la désorientation. Ces émotions peuvent être vécues comme un deuil, où l’individu perd une partie de ce qu’il était, et se retrouve dans une situation de confusion.
Bridges insiste sur le fait que cette phase doit être vécue pleinement, même si elle est difficile. Il faut accepter cette perte pour pouvoir avancer.
2. La Zone Neutre : L’Errance dans le Vide
La zone neutre est au cœur de la réflexion de Bridges. Elle représente une phase de flottement, où l’individu se trouve « entre deux mondes », dans une sorte de vide existentiel, sans repères clairs. C’est un espace de transition où la personne ne sait pas encore ce qu’elle devient. Il y a une perte de sens temporaire, et tout semble flou, comme si l’on se trouvait dans un entre-deux difficile à définir. C’est une phase d’incertitude, de confusion, mais aussi de potentiel de développement futur!
Bridges nous invite à ne pas fuir ce vide. Au contraire, il faut s’y immerger et lui accorder toute son attention. Il souligne que ce chaos intérieur peut être source de créativité et de renouveau, car c’est dans cette incertitude qu’un changement profond peut émerger.
3. Le Nouveau Départ : La Réinvention de Soi
La dernière étape du modèle de Bridges est le nouveau départ, où l’individu trouve un sens renouvelé à sa vie et commence à poser les bases d’une nouvelle direction. Ce moment marque le début d’un projet ou d’une aventure nouvelle, qui est une conséquence directe de ce que l’on a appris et intégré dans la zone neutre. Le nouveau départ représente un acte de création, une réinvention de soi.
L’Apport de Roberge : Les Saisons du Changement
Inspirée par les travaux de Bridges, Madeleine Roberge (1998) apporte de façon analogique la traduction du changement au travers des saisons. Pour elle, les transitions ne sont pas seulement un enchaînement linéaire de phases, mais des saisons interconnectées, chacune ayant sa propre dynamique et sa fonction spécifique.
1. L’Automne : L’Achèvement et le Deuil
L’automne représente, pour Roberge, le temps de la perte et de l’achèvement. C’est une phase où l’individu doit faire face à ce qu’il doit laisser derrière lui pour évoluer. L’automne est donc une période de deuil, où la personne se trouve confrontée à des émotions de tristesse, de solitude et de désorientation. Bien que cette étape soit souvent perçue négativement, Roberge y voit une occasion de nettoyage intérieur. Elle parle d’une désidentification, où l’individu perd ses repères habituels et doit se réinventer.
2. L’Hiver : L’Errance Essentielle
La deuxième saison de la transition, l’hiver, est pour Roberge un moment de flottement nécessaire. Elle la qualifie d’errance essentielle, une période où l’individu se trouve plongé dans un vide créatif, où les repères sont effacés et où la confusion règne. Contrairement à Bridges, qui parle de la zone neutre comme d’un vide passif, Roberge insiste sur le fait que cette phase d’errance est active et dynamique. L’hiver, loin d’être un simple arrêt, est un moment d’exploration intérieure, un temps où il faut accepter l’incertitude et faire face à l’ombre, à ce qui est encore inconnu de soi.
L’idée d’errance essentielle met l’accent sur la mouvance et la flexibilité qui peut être vécu dans cet espace. L’individu peut éprouver des émotions contradictoires, allant de l’impatience à l’angoisse, mais cette errance permet d’ouvrir de nouvelles perspectives et de générer une énergie nouvelle. La clé ici est de vivre pleinement cette phase sans chercher à la fuir.
3. Le Printemps : Le Nouveau Commencement
Enfin, le printemps symbolise le nouveau départ ou la création d’un nouveau projet. Après avoir traversé l’automne du deuil et l’hiver de l’errance, l’individu est prêt à rebondir. Mais, selon Roberge, ce printemps ne doit pas être précipité. L’angoisse du changement peut pousser certaines personnes à vouloir se précipiter vers le renouveau sans avoir véritablement intégré la phase de deuil ou d’errance. C’est ici que Roberge met en garde contre l’impulsivité. Passer directement à l’action sans avoir pris le temps d’intégrer les leçons de la transition peut entraîner une répétition des mêmes erreurs.
A Retenir : Vivre Pleinement Chaque Saison
À travers les modèles de Bridges et Roberge, nous comprenons que les transitions ne sont pas linéaires et qu’elles ne peuvent être vécues comme des événements ponctuels que l’on « surmonte » rapidement. Ce sont des processus dynamiques, qui exigent du temps et de la réflexion. Chaque étape du changement – qu’il s’agisse de la fin, de l’errance ou du renouveau – doit être vécue pleinement pour permettre une véritable transformation.
Les saisons du changement, selon Roberge, nous rappellent que chaque phase, même la plus difficile, est essentielle à la croissance. L’hiver de l’errance, bien que redouté, est une étape cruciale pour la réflexion et la réinvention de soi. Le printemps, quant à lui, symbolise le potentiel de création et de renaissance, mais nécessite de respecter le rythme des transitions.
CONCLUSION
Accueillir le VIDE pour créer du SENS
La Présence et l’Introspection : Roberge insiste sur l’importance de la présence à soi et à l’autre dans les transitions. L’errance, par exemple, doit être vécue avec ouverture et réceptivité, pour permettre à l’individu d’entendre ses propres intuitions et de se réorienter vers son nouveau soi.
Que l’on parle de la zone neutre de Bridges ou de l’hiver de l’errance chez Roberge, il est essentiel de comprendre que le vide, loin d’être un obstacle, est une opportunité de transformation. Il faut accepter de s’y installer, de vivre l’incertitude et de laisser émerger de nouvelles possibilités. La clé pour traverser ces moments chaotiques est d’être présent à soi-même, d’écouter les signes intérieurs, et d’être ouvert à l’inconnu. Chaque transition, aussi difficile soit-elle, ouvre la porte à un nouveau départ.
Naviguer à travers les Saisons du Changement
L’errance, loin d’être un obstacle, est une phase féconde de changement. Elle permet de rencontrer le vide, de s’y installer et d’en sortir transformé. Pour les jeunes adultes en pleine transition professionnelle ou personnelle, cela peut être un processus complexe, mais nécessaire, pour se réinventer et accueillir le changement avec conscience et présence. Il est essentiel de s’ouvrir à ces périodes chaotiques, d’accepter l’incertitude et de permettre à de nouvelles opportunités de germer dans l’espace laissé libre par le chaos intérieur.
Ainsi, vivre pleinement chaque phase de la transition, en particulier l’errance, permet non seulement d’apprivoiser le changement mais aussi de réinventer sa vie et de créer du sens dans un monde en constante évolution.